© Grégoire Romefort

© Grégoire Romefort

Alors que les adeptes du soleil exposent leur visage à ses rayons, une perturbation barométrique au-dessus de l'océan Atlantique plante déjà ses hameçons et ses crochets dans les spirales du cerveau placide de Vladimir, les gouttes de pluie qui s'approchent enserrent ses tempes dans un étau, et alors qu'à Prague il fait un temps superbe, une tempête alpine soulève le diaphragme de Vladimir et comprime jusqu'à la gorge son cœur sans défense.

C'est ce qu'il faut - faire de soi un instrument allergique qui présage les événements et les corrélations touchant hommes et choses avant qu'ils ne soient. Le fil s'échappe de l'aiguille et l'on sursaute, effrayé de ce que la foudre a fendu un tilleul centenaire ; une feuille tombe d'un arbre et l'on se fige, sachant qu'un avion s'est écrasé ; les jointures déficientes entre les doubles vitrages impriment au papier à cigarettes un mouvement et un son à peine perceptibles, et l'on reste en alerte jusqu'à ce que notre tête intra et extravertie ait établi la cause de son alarme.

Tendre barbare, Bohumil Hrabal


La musique et le texte dont la chorégraphe s’est inspirée pour la création du duo Seuls bruits des corps entre eux tendent à renverser les termes d’absence et de présence, en les déplaçant vers un territoire moins matériel et plus impalpable. Ce que l’on ressent ne se perçoit pas en tant que tel : il ne reste presque qu’un mouvement aveugle et énigmatique d’accélération et de décélération, de pulsations périodiques, un climat d’angoisse dont la motivation psychologique externe, est inaccessible à nos sens. Quelques réminiscences de chansons, de lambeaux défaits de réalité dans ce climat, apparaissent comme des portes dans un long couloir à parcourir, où chacun des deux personnages évolue dans l’intimité de sa propre solitude.

Seuls bruits des corps entre eux est la dernière pièce du programme de pièces courtes Paumes.

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